Un bol d'air frais (Népal)
06.04.2019 au 20.06.2019
Entrée en matière.
Notre arrivée au Népal fut immédiatement revigorante. La frontière franchie, nous trouvons rapidement un emplacement pour installer notre tente. Les retrouvailles avec la nature, le calme et la paix - inexistants en Inde - nous font rester deux nuits au même endroit. Lorsque nous reprenons la route, nous parcourons la petite distance nous séparant du village de Tansen. Il ne nous faut pas plus de kilomètres pour réaliser que la sauvagerie du trafic indien n’est plus. Les gens sont courtois, altruistes et s’arrêtent même pour nous laisser la voie libre, c’est dire ! A Tansen, nous passons un moment paisible. Balade dans les environs et nourriture locale auprès de nos hôtes, avant de reprendre la route en direction de Pokhara. Deuxième ville du pays, sa situation géographique la rend très touristique. Sise littéralement au pied de la chaine de l’Annapurna (l’altitude passe de 1’000 à plus de 7’500 mètres en moins de 30 kilomètres), elle est parée de nombreux atouts. Encore une fois, nous prenons le temps de découvrir les environs dont la jolie World Peace Pagoda dominant la ville du haut de sa colline. Malheureusement pour nous, les nuages présents ce jour là nous permettront d’apercevoir les montagnes que par intermittence.
Mustang sauvage.
En pleine forme et le plein de provisions fait, nous partons en direction de la région du Mustang, notre réel premier coup de cœur. Après une route nous menant à l’entrée de la vallée - entre rizières et falaises abruptes - nous attaquons le vif du sujet. L’itinéraire, longeant la rivière Gandaki, est soit caillouteux, soit boueux. Nous avançons lentement mais surement, jusqu’à être bloqués dans un petit village. Un camion en équilibre, à deux doigts de s’affaisser sur un temple, bloque la partie gauche de la route. Dans l’autre sens, un bus ne pouvant reculer est également coincé. La phase d’observation terminée, les gens commencent à s’affairer pour résoudre la situation. De notre côté, le ciel menaçant et la fin de journée approchant nous décident à prendre une chambre pour la nuit. Le lendemain le trafic est revenu à la normale. Nous effectuons quelques kilomètres avant de nous arrêter au bord du cours d’eau, que nous remontons toujours, pour nous concocter un petit déjeuner. Nous apercevons les montagnes enneigées au loin, le ciel est prometteur, en avant ! Pas si vite, quelques mètres plus loin nous sommes stoppés par une opération de dynamitage. Nous patientons une heure avant de pouvoir repartir, tels sont les aléas du Mustang. Une fois dégagée, nous reprenons la route et avançons à un rythme correct. Quelques grêlons tombent lorsque nous traversons le village de Kalapani. Le panorama alentours nous décide à chercher un endroit où passer la nuit. Aisément, nous trouvons un bout de verdure en contrebas de la route au bord de l'eau. Nous sommes entourés de sommets enneigés de toute part pointant le bout de leurs cimes par intermittence. Il ne nous en faut pas plus pour décider de rester une journée à ne rien faire à cet emplacement. Et également car nous passons plusieurs heures à réparer notre réchaud capricieux (caprice compréhensible étant donné la qualité de l’essence lui servant de combustible) afin de pouvoir prendre notre petit déjeuner. Avoir le temps est notre constante, et l’avantage est que nous pouvons le prendre quand bon nous semble.
De la tête aux pieds.
Lorsque nous repartons, les premiers tronçons sont splendides, puis nous sommes à nouveau arrêtés un instant par des travaux sur la route. S’ensuit un enchainement de traversées de rivières, plus ou moins ardues. Les paysages évoluent, plus désertiques, mais les montagnes, toujours présentes, restent aussi belles. Arrivés au village de Jomsom, nous apprenons que nous devons acquérir un nouveau permis afin de pouvoir continuer. Étant deux fois plus cher que le prix normal, ne désirant faire qu’une vingtaine de kilomètres de plus et n’ayant de toute façon pas l’argent nécessaire, nous décidons de faire demi-tour - et de retourner à notre spot de camping préféré. Sur le chemin du retour, au niveau des passages de rivières, Amaia coince Bonnie sur un caillou au milieu du cours d’eau. Impossible de bouger la Triumph. Après plusieurs minutes de bataille, entièrement trempés, une âme charitable voulant bien se mouiller les pieds nous permet de décoincer la moto de son piédestal. A nouveau installés, nous faisons un feu pour tenter de sécher nos affaires et avons la visite de Gaspard, un chien affectueux, qui passera la nuit à l’entrée de notre tente. Au matin, il est toujours là. Et lorsque nous partons, il nous donne l’impression de l’abandonner en courant derrière nos motos pendant plusieurs kilomètres. Ayant parcouru la route en sens inverse, nous sortons du Mustang et rejoignons la route principale, c’est à cet instant que l’orage craque. A 70 kilomètres de Pokhara nous ne sommes pas au bout de nos peines. Nous sommes trempés jusqu’aux os et avançons entre les éclairs sur un torrent ruisselant sur la route. Le garde boue avant de Klyde n’ayant pas survécu au Mustang, c’est la douche assurée pour Marvin. Lorsque la nuit tombe nous nous rappelons un passage particulièrement boueux à l’aller et nous demandons dans quel état il est. La réponse ne se fait pas attendre, c’est devenu une véritable rivière dont le lit est formé de gros cailloux faisant sauter - et tomber pour Klyde - nos machines dans tous les sens. C’est ainsi que nous nous retrouvons, de nuit, des éclairs tombant de part et d’autre, roulant dans le sens longitudinal d’une rivière faisant office de route. Lorsque nous arrivons à Pokhara notre état est déplorable, sales, épuisés, mouillés. Nous nous requinquons à l’aide de nourriture locale, d’une douche et d’une nuit de sommeil.
Route vers Katmandou.
Après notre magnifique mais éprouvant périple au Mustang, nous passons quelques jours à Pokhara afin de nous reposer, bien manger et nettoyer toutes nos affaires. Remis de nos émotions, nous repartons en direction de l’est et de Katmandou. En route nous effectuons une halte au très joli lac Begnas ainsi qu’au non moins charmant village de Bandipur. Dans ce dernier, nous découvrons le centre historique magnifiquement préservé et visitons l’impressionnante Siddha Gufa, la plus grande grotte du Népal. Après une journée caniculaire de route et une nuit sur le terrain de football d’un petit village (ponctuée par la visite d’enfants curieux mais adorables), nous arrivons dans la capitale népalaise. Le programme est simple : effectuer les services de nos motos, partager nos expériences de voyage avec nos compatriotes Carole et Mike rencontrés un an plus tôt en Croatie et attendre l’arrivée de nos amis Jade et Guillaume pour aller côtoyer les cimes de l’Himalaya.
Quelques jours plus tard, comme prévu, nous retrouvons nos acolytes venus depuis la Suisse. Les retrouvailles sont chaleureuses (et nous ne disons pas cela uniquement parce qu’ils transportent dans leurs bagages du gruyère et du chocolat). Nous effectuons ensemble une brève visite de la ville et terminons les derniers préparatifs avant de rejoindre le village de Syabru Bensi en une journée de bus de plus de 9 heures.
Ascension entre amis.
Réaliser une randonnée dans l’Himalaya au Népal est incontournable. Pour cela, nous avons décidé de nous rendre dans la région du Langtang. Située à proximité de Katmandou, elle permet d’effectuer des marches de quelques jours tout en côtoyant des sommets à plus de 7'000 mètres d’altitude. Nous y avons passé 6 journées sublimes.
Jour 1. L’entame nous met en jambe, les premiers kilomètres dans une végétation encore luxuriante, nous remontons un cours d’eau que nous enjambons plusieurs fois via des ponts suspendus à l’état variable. Après une pause et un thé rituel, nous crapahutons jusqu’au village de Rimche et mettons déjà nos muscles à l’épreuve. Dans le petit village, nous bénéficions d’une douche et de nourriture. Il ne nous faut rien de plus pour être heureux.
Jour 2. Les premiers sommets enneigés se dévoilent. Le parcours est ponctué de raidillons sollicitant nos jambes qui commencent à prendre le rythme. Entre les troupeaux de yacks et de mules, nous atteignons le village de Gumba où nous décidons de passer la nuit. Situé au pied d’une paroi rocheuse impressionnante parcourue par une cascade, le cadre est idyllique. Le Langtang Lirung, point culminant de la vallée, dévoile même le bout de ses 7’134 mètres.
Jour 3. En une demi-journée nous atteignons le village de Kyanjin Gompa, point de base pour notre ascension finale : le Tsergo Ri, culminant à presque 5'000 mètres. Lors du trajet, nous apercevons notre objectif pour la première fois, accompagné du fond de la vallée et des divers monts enneigés. Dans le village, nous nous installons dans une guesthouse offrant un panorama à faire pâlir le plus luxueux des hôtel. Pas fatigués pour un sou, nous décidons d’occuper notre après-midi en nous rendant aux pieds des glaciers situés à quelques encablures. Inutile de dire que le décor est à nouveau superbe. De retour, nous donnons une chance au fromage local en terminant la journée au coin du feu à jouer aux cartes.
Jour 4. 5h du matin, le temps est au beau fixe. Nous observons par la fenêtre le sommet du Langtang Lirung déjà éclairé par les premières lueurs. Le temps de nous égarer quelque peu - et par conséquent d’ajouter quelques mètres au dénivelé déjà important de la journée - nous attaquons l’ascension du Tsergo Ri. Pourtant délestés d’une bonne partie de nos affaires, dès le début nous sommes dans le dur. Nos amis valaisans, plus en forme que nous, donnent le rythme. Un pas après l’autre, nous prenons de l’altitude et commençons à sentir l’oxygène se raréfier. Notre souffle est court, chaque pas est plus difficile que le précédent. Chaque 200 mètres de dénivelé nous nous offrons une pause et admirons le paysage qui nous entoure, époustouflant. Plus nous avançons plus nous découvrons de nouveaux sommets à l’horizon. La dernière ligne droite s’effectue dans la neige fraiche de la nuit avec notre objectif en ligne de mire. Un peu plus de 4h et 1'100 mètres de dénivelé positif plus tard nous atteignons les 4’984 mètres, notre record personnel à tous les quatre. Si une couverture de nuages emplit dorénavant le ciel, le spectacle à 360 degrés reste néanmoins saisissant. Des sommets à perte de vue avec, au nord et à l’est le Tibet s’offrant à nous. A l’ouest, le Langtang Lirung dominant toujours la vallée avec, à ses pieds, notre point de départ, le village de Kyanjin Gompa. Étant les premiers de la journée à atteindre le sommet, nous passons plus d’une heure à contempler ce panorama, en mangeant, en guise de symbole, nos derniers carrés de chocolat. En descendant, nous avons des ailes et plaignons les personnes en pleine ascension que nous croisons. De retour au village, fatigués mais fiers, nous passons une après-midi reposante.
Jour 5 et 6. A l'instar de la veille nous nous levons tôt. Amaia n’est pas en forme et décide de rester couchée, à cause de l’altitude peut être. C’est donc à trois que nous gravissons le sommet intermédiaire du Kyangin Ri. En une heure, les jambes encore chaudes de la veille, nous atteignons les 4’300 mètres sans problème. La couche de neige tombée pendant la nuit renforce la beauté des paysages. Redescendus, le ventre plein et sans oublier de faire quelques provisions de fromage local (à qui nous avons bien fait de donner une chance), nous entamons le chemin du retour. Nous ne pouvons nous empêcher de nous retourner pour observer la beauté du paysage que nous laissons derrière nous. Une fois notre rythme de croisière repris, nous rejoignons le village de Syabru Bensi en deux jours. En chemin, nous croisons des ruines nous rappelant tristement que cette région a été violemment touchée par l’important séisme de 2015. De retour à la case départ, nous nous offrons une bière méritée et passons une dernière nuit avant de retourner au vacarme de la ville.
Au revoir les amis...
Pour les derniers jours de Jade et Guillaume, nous nous installons dans la ville de Bhaktapur, plus calme et pittoresque que Katmandou. Trois jours plus tard, nous nous retrouvons à nouveau tous les deux à prendre notre petit déjeuner. Une sensation toujours étrange après avoir partagé un bout de notre voyage avec des amis ou de la famille.
... et bonjour les dégâts.
Il est temps de planifier la suite de notre périple. Nous retournons donc à Katmandou, plus intéressante logistiquement, et y passons une dizaine de jours. Pendant cette période nous effectuons la demande de notre nouveau visa indien, revoyons nos amis Carole et Mike (de retour de leur randonnée jusqu’au camp de base de l’Everest) ainsi que Jürgen - lui aussi voyageur à moto - que nous avons croisé plusieurs fois et qui prend l’avion le lendemain pour retourner en Europe et terminer son voyage. Les discussions vont bon train et, au moment des adieux, l’émotion d’arriver à la fin d’une telle aventure est palpable. De notre côté, nous quittons également Katmandou, pour une destination plus proche puisque nous retournons en Inde pour aller découvrir le nord du pays et afin de mener à bien un projet qui trotte dans notre tête depuis notre premier passage à Delhi. Cependant, lors de notre deuxième jour de conduite, un bruit atroce nous fait comprendre que ça ne se passera pas comme prévu. Une énorme tâche d’huile dans un virage a fait chuter Amaia. Les barres de protection, les caisses latérales et l’équipement ont joué leur rôle. La moto a de jolies égratignures et le réservoir du liquide de frein avant est arraché. Amaia, quant à elle, ressent une douleur à l’épaule l’empêchant de continuer à rouler. Aidés par deux locaux, nous nous rendons comme possible (c'est à dire à deux sur Klyde et un népalais conduisant Bonnie sans frein avant) au prochain village puis, le lendemain, décidons de retourner à Pokhara, ville majeure la plus proche (mais tout de même à 200 kilomètres). Nous effectuons alors le trajet à bord d’un pickup, les motos chargées à l’arrière. Pendant 13 heures nous sommes bringuebalés sur les mauvaises routes népalaises.
Du repos et ça repart.
A Pokhara, nous reprenons les habitudes de notre première visite : découverte des restaurants de la ville, balade dans les environs et visionnage des dernières séries en vogue. A cela nous ajoutons quelques visites médicales. Après une IRM, le diagnostic du médecin est posé : micro fracture de l’humérus et extension du muscle avec pour seul remède du repos. Nous passons donc une vingtaine de jours à Pokhara pendant lesquels l’épaule d’Amaia se remet d’aplomb. Lorsque c'est la cas, nous enfourchons à nouveau nos montures, et retournons en Inde pour aller voir à quoi ressemble l'Himalaya de ce côté de la frontière.
A gauche : Pokhara.
Au droite : on reprend la route.